Impressions parcellaires d’une nuit aux frontières de l’urbain

Le rythme est physique. Les respirations de Mauro Santini forment le tempo de Vaghe Stelle, conçu comme un album de musique en sept mouvements.

Le cinéaste traverse des lieux familiers, oubliés des dormeur·euses, des lieux inadaptés à la nuit, soudain silencieux. Il s’engage sur le périphérique d’une ville vidée de ses voitures ou sur les abords dénudés d’un chemin de fer. Des sons, imperceptibles de jour, existent enfin. L’onde puissante, réverbérée, d’un train nous emmène. Le flou, le ralenti, les surimpressions, les fondus ou les collages racontent la singularité de sa nuit blanche.

Au fil des chapitres, ces impressions nocturnes évoquent des visions diurnes de ces zones entre ville et campagne. Comment éclaire-t-on la nuit ? Les phares d’une voiture révèlent une maison sur l’écran. L’image grandit, des ombres feuillues se dessinent lentement sur le mur en béton, la voiture passe et c’est la nuit à nouveau. Le cinéaste laisse des éclairages artificiels exposer l’écran noir. Des étoiles se meuvent. Un essaim de moucherons bourdonne autour d’un halogène. Le lampadaire éclaire crûment des camions noirs alignés. Le soleil éclaire la lune, la lune éclaire la terre.
Quand Mauro Santini filme le cercle lunaire à travers une loupe, la lune peut alors être touchée puis caressée du bout des doigts. On entre dans la matière, corps humain et corps de la caméra rapprochent la lune de la terre. Des milliers de lumières brillent par les fenêtres d’un avion, et ont l’allure des étoiles qui peuplent la galaxie. Le macrocosme se retrouve dans le microcosme. In fine, le film s’offre comme une connexion sensible entre l’espace astral et terrestre. Les sept étoiles de la Grande Ourse, dont les sept mouvements du film portent les noms, séjournent maintenant sur terre. Les points cardinaux se renversent. Deux images en surimpression font alors se coucher la lune dans l’espace immense des habitations d’une ville. On avance, désorienté·es.